Edmond Gerrer (1919-1996) avait succédé à Joseph Rey au poste de maire de Colmar, le 2 décembre 1977, après avoir été longtemps son premier adjoint. Il était entré au Conseil municipal dès 1953 et avait pris une part active dans les grands dossiers de l’après-guerre. La création de la zone industrielle, en 1958, et surtout l’extension urbaine à l’ouest de la ville, à partir de 1960, furent alors ses grands chantiers. Il s’était engagé avec détermination dans l’ambitieux projet de ce que parfois il appelait « la ville nouvelle ». Il avait en parfait philosophe – n’avait-il pas été l’élève de Heidegger à Fribourg ? – rêvé de la cité idéale. Mais le pédagogue savait que le chemin serait difficile. Ce que confirmèrent ses trois mandats de maire.
Quand il devint maire, « les Trente Glorieuses » étaient terminées. La récession avait frappé durablement l’économie et le chômage avait cru de façon spectaculaire. Il réussit cependant à préserver la ville du déclin et à maintenir sa compétitivité. Colmar continua d’attirer les investisseurs : l’entreprise japonaise Ricoh, en 1987, en fut le plus emblématique. L’enseignant, qu’il ne cessa jamais d’être, contribua au renforcement du poids scolaire et universitaire de la ville. Il développa la recherche et l’enseignement supérieur, permettant à Colmar de devenir le second pôle de l’Université de Haute Alsace. En 1993, l’I.U.T de Colmar, fort, à l’époque, de ses quatre départements, gagna son autonomie par rapport à Mulhouse. L’Ecole Serpentine (1983), l’école maternelle des Marguerites (1988), des Magnolias (1989), l’école bilingue Wickram (1995) et surtout le nouveau lycée Camille Sée (1991) ainsi que le lycée Martin Schongauer (1994) vinrent compléter les équipements existants. Sous son mandat enfin, en 1995, fut réalisé le contournement autoroutier de Colmar, supprimant ainsi l’un des derniers points noirs de la circulation en Alsace.
La conservation du patrimoine et le développement culturel retinrent également son attention. Edmond Gerrer avait lancé la restauration de la collégiale Saint-Martin (1972-1985), des églises des Dominicains (1980-1993) et des Franciscains, actuelle église Saint-Matthieu (1982-1997). Il avait su donner une nouvelle impulsion à la vie culturelle de la cité en transformant l’ancienne manufacture des tabacs en maison des associations (1985) et théâtre (1990) où l’Atelier du Rhin trouva refuge. Sous son impulsion, le musée Bartholdi rouvrit ses portes en 1979. En 1985, le muséum d’Histoire naturelle fit de même dans ses nouveaux locaux de la rue Turenne. Mélomane, il avait également réussi à attirer à Colmar, en 1989, le chef d’orchestre et violoniste russe Vladimir Spivakov qui allait développer un festival prestigieux au rayonnement international. Enfin, grâce à son appui, une école maîtrisienne de garçons vit le jour à Colmar, en 1985, et devint en quelques années une des premières maîtrises de France. Edmond Gerrer avait, à la fin de son mandat, donné le feu vert à la réalisation d’un espace d’art contemporain, le futur espace Malraux, inauguré peu après sa disparition en 1996. Humaniste et fin lettré, il avait été à l’origine du Salon du livre de Colmar (1989) et avait ouvert sa ville au vaste monde en la jumelant avec Eisenstadt, la ville de Haydn, capitale du Burgenland en Autriche (1983), Princeton, prestigieuse ville universitaire américaine (1987), et enfin Györ en Hongrie (1993).
Au terme de son dernier mandat municipal et d’une législature de député (1988-1993), Edmond Gerrer se retira en 1995. Il devait décéder, un an plus tard, le 26 mai 1996, vaincu par une implacable maladie qu’il avait supportée avec un rare courage.
GB 2006, extrait de Braeuner (Gabriel), (Lichtlé Francis), Dictionnaire de Colmar, Colmar, 2006
Schmitt (Jean-Marie), N.D.B.A., p.1171-1172.
Muller (Claude), Schmitt (Jean-Marie), Braeuner (Gabriel), Le Crédit Mutuel Colmar Bartholdi, Strasbourg, 2002.